Réindustrialisation : quand les consultants accompagnent la souveraineté industrielle.
- Giulia
- 2 juil.
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 31 juil.

Une ambition nationale au cœur des priorités politiques et économiques
Face à la multiplication des crises – sanitaires, géopolitiques, énergétiques – la France, à l’instar de nombreux pays occidentaux, a vu resurgir avec force une priorité stratégique : retrouver une souveraineté industrielle. Cette volonté, portée par l’État et de nombreux acteurs économiques, s’inscrit dans un mouvement plus vaste de réindustrialisation visant à relocaliser les chaînes de production stratégiques, sécuriser les approvisionnements et dynamiser l’économie des territoires.
Dans cette dynamique, les cabinets de conseil jouent un rôle de catalyseur. Qu’ils accompagnent les pouvoirs publics, les industriels ou les investisseurs, ils contribuent à structurer les feuilles de route, mobiliser les technologies et opérer les transformations industrielles nécessaires pour renouer avec une production nationale compétitive et durable.
Réindustrialisation et souveraineté : des enjeux entremêlés
La pandémie de Covid-19, puis les tensions sur les matières premières et les chaînes logistiques, ont mis en lumière les fragilités d’un modèle économique basé sur la dépendance vis-à-vis de fournisseurs extra-européens. De la production de masques à celle des semi-conducteurs, en passant par le secteur pharmaceutique, la France s’est rendu compte qu’elle devait mieux maîtriser ses capacités industrielles.
Dans ce contexte, la réindustrialisation s’impose comme un levier de souveraineté. Il ne s’agit pas simplement de relocaliser, mais de rebâtir une base industrielle performante, écologiquement soutenable et technologiquement avancée. Cela nécessite des investissements massifs, une refonte des compétences, une coordination entre acteurs publics et privés, mais aussi une vision stratégique à long terme.
Les cabinets de conseil, architectes de la transformation industrielle
Un appui stratégique à l’investissement et à la planification
Dans ce chantier gigantesque, les consultants interviennent à plusieurs niveaux. Tout d’abord, en amont, ils accompagnent les réflexions stratégiques autour des filières prioritaires (hydrogène, batteries, électronique, santé, etc.), identifient les zones géographiques propices à l’implantation de sites industriels, et aident à construire des business plans robustes, tenant compte des contraintes économiques, sociales et environnementales.
Par exemple, les équipes de cabinets tels que Roland Berger, McKinsey ou encore EY-Parthenon ont été mobilisées pour définir les conditions de développement de “filières d’avenir” dans l’automobile électrique ou l’agroalimentaire. Ces missions incluent des analyses de chaînes de valeur, l’évaluation des écosystèmes locaux, mais aussi la conception de scénarios de relocalisation à l’échelle européenne.
Un rôle central dans l’opérationnalisation des projets
Une fois la stratégie arrêtée, la mise en œuvre s’avère tout aussi complexe. C’est là qu’interviennent les expertises en conduite du changement, excellence opérationnelle et pilotage de projet. Les consultants travaillent aux côtés des industriels pour optimiser les sites existants, réduire les coûts de production, digitaliser les ateliers, former les équipes, et aligner les processus sur les exigences environnementales (notamment la réduction de l’empreinte carbone).
Des cabinets comme AlixPartners, Wavestone ou Kea Partners sont ainsi mandatés pour accompagner les transformations industrielles “end-to-end”, depuis le design industriel jusqu’au déploiement opérationnel. Leur connaissance des filières, mais aussi des dispositifs de soutien public (France 2030, plans régionaux d’investissement), permet d’articuler les ambitions nationales avec les réalités de terrain.
Une posture renouvelée du conseil face à la transition industrielle
Des enjeux de mission et d’impact
Au-delà de l’accompagnement traditionnel, on observe une évolution du rôle même du conseil : les cabinets ne se contentent plus de livrer des recommandations, ils s’inscrivent dans la durée et endossent un rôle de tiers de confiance auprès des parties prenantes. Certains vont jusqu’à co-investir dans les projets via des structures de capital-risque ou de financement d’infrastructure.
Cette posture plus engagée reflète une attente croissante des clients pour des prestations de conseil à fort impact, quantifiables en termes économiques, sociaux et environnementaux. Elle oblige aussi les cabinets à renforcer leurs compétences techniques sur des sujets industriels pointus : génie des procédés, écoconception, fabrication additive, etc.
Une montée en puissance de l'expertise territoriale
La réindustrialisation ne peut réussir sans une ancrage local fort. Il s’agit de prendre en compte les spécificités des territoires (bassins d’emploi, infrastructures, soutien politique local) pour bâtir des écosystèmes compétitifs. Les cabinets doivent ainsi sortir de la logique purement macro pour co-construire les plans industriels à échelle régionale, en lien avec les collectivités, les universités et les agences de développement économiques.
Cela implique une hybridation des expertises : des profils d’ingénieurs, planificateurs urbains, experts en financement public et conseil en stratégie travaillent main dans la main. Une évolution qui dessine aussi une nouvelle cartographie du conseil, plus territorialisée, plus connectée aux réalités industrielles locales.
Un révélateur du repositionnement stratégique du conseil
L’accompagnement de la réindustrialisation place les cabinets de conseil au centre d’un projet national structurant. Il révèle également les mutations profondes d’un secteur qui, face aux bouleversements économiques et climatiques, doit adapter ses modèles, ses expertises et son mode d’intervention.
En se positionnant à la croisée des politiques publiques, de l’innovation technologique et de la transformation industrielle, les consultants deviennent des partenaires clés de la souveraineté économique. Ce mouvement pourrait bien redessiner les contours du conseil stratégique dans les années à venir, en conjuguant performance, durabilité et résilience industrielle.
À l’heure où l’industrie redevient un levier de puissance, il n’est plus simplement question d’efficacité opérationnelle, mais de contribution à une ambition collective. Et dans cette équation, le rôle du conseil s’annonce plus que jamais décisif.




